• Salah Stétié et ses amis artistes, Maison Elsa Triolet-Aragon, Saint-Arnoult-en-Yvelines, 2003
  • SALAH STÉTIÉ
    Du 14 juin au 7 septembre 2003

    à la Maison
    Elsa Triolet – Aragon

    Moulin de Villeneuve
    78730 Saint-Arnoult-en-Yvelines

    Tel : 01 30 41 20 15
    Fax : 01 30 41 43 92 

    C’est une fête de famille.
    Quand un poète se retrouve entouré de ses peintres, de tous ceux, sculpteurs aussi et graveurs, qui ont travaillés avec lui, il ne peut que nager dans ce léger bonheur que lui donne le sentiment d’avoir été compris, d’avoir même été aimé. Sinon, pourquoi tous ceux-là, ces vingt ou trente merveilleux rêveurs pour leur compte, auraient-ils mobilisé leur propre rêve pour le mettre au service de ses images mentales à lui, de ses surgissements affectifs ou abstraits, de son délire singulier, de ses voiles et de ses dévoilements, de sa panoplie de mots, tous ces pièges ? Pourquoi leurs lignes, leurs couleurs, leurs signes mythologiques les plus personnels, leur foudre intime, ces instruments aussi qui sont les leurs, pinceaux et burins, crayon, fusain, toile et papier, oui, pourquoi toute cette batterie de cuisine alchimique vient-elle se placer sous l’autorité d’un autre imaginaire ? Le poète a-t-il réponse à fournir à toutes ces questions qui l’assiègent comme banderoles au vent à l’heure de la fête partagée ? Il se dit que s’il a été élu par tous ces peintres et s’il a été d’eux aimé, c’est que sans doute une communication s’est établie, une circulation s’est mise en place, vivante et décisive, peut-être une porosité seulement mais insistante, entre ce qu’il portait, lui, d’émotions et d’intuitions, dans sa langue, et ce que ses complices devenus ses amis nécessairement, portaient de leur côté dans ces langues magiques qui sont les leurs et, au-delà, dans cette langue commune à tous les hommes quand ils se prennent à rêver tout haut, mots et couleurs, et qui a nom : poésie. « Les rêveurs en dormant travaillent fraternellement à la recréation du monde », dit Héraclite.

    Nous croyons habiter une planète qui tourne autour d’une étoile de feu et nous tournons, croyons-nous, avec notre habitat, autour de ce feu dévorant et qui nous dévorera. En fait, nous habitons la maison de nos livres, dont certains sont dits par nous saints ou sacrés ; nous nous sentons protégés par leur murmure à nos oreilles et, à nos yeux, par cette brume zébrée d’éclairs qui monte des pages. C’est autour de nos mots que nous tournons. Déjà partis, un pied dans le vide, nous imprimons d’un coup de talon l’empreinte paradoxale de notre sur la peau du désert naissant.
    Salah Stétié